dimanche 5 décembre 2010

T'as le flow à Nolwenn

Je regarde la neige tomber à Vevey, le lac comme un écran gris et opaque, les gens, toujours les mêmes, déambuler sous ma fenêtre.
C'est lors de ces dimanches chelous et enneigés que je me demande ce qui m'a pris un matin de clamer à tout le monde, amis, famille, que je partais une énième fois m'enfermer dans une ville hors du temps ou on me foutrait enfin la paix, comment je suis arrivée ici, pourquoi je suis partie.
Parfois je repense à ce qu'était ma vie à paris, à new york, ou à saint gilles. Il y a ces matins glacés, dans le soleil blanc de Brooklyn, où je sortais à 6h pour prendre mes premières photographies ; il y a l'aéroport où j'ai laissé les deux empreintes de mes index ; il y a cette rue à Saint Germain, derrière l'église, où j'ai quitté quelqu'un ; il y a la baignoire blanche où mon chat jouait ; il y a cette soirée hors du temps, coulée dans l'eau, que j'ai passé dans un taxi sans but précis à regarder la Seine ; il y a les élevages d'escargots que mon frère et moi avions ; il y a nos pieds écorchés par le sable brulant et les coquillages ; il y a la tour de briques infestée de nids de guêpes ; il y a les Rapido à la chaine auxquels on jouait entre deux gorgées de bière éventée ; il y a Ugo qui m'explique qu'il veut partir ; il y a une chanson d'Herman Dune pour chaque instant, chaque minute, chaque pensée de vingt-et-une années.
Et maintenant je suis a Vevey. Plus tard, dans deux ans, peut-etre plus, j'aurai surement des souvenirs ici. Je me souviendrai du lac, de la neige qui tombe sans s'arrêter, d'un garçon que j'aimais bien, de la route que je prenais pour aller à l'école ou au bar, du sourire de mon colloc, de la photographie qui a pris toute la place dans ma vie ; je me souviendrai des questions existentielles qui nous traversaient, à 3h du matin, bourrés comme des coings dans ma cuisine, devant le vide abyssal que nous réserve l'avenir ; je me souviendrai des dépressions que nous avons connu, de toutes les images qu'on aura fait, de l'impression indélébile d'être une boule de billard que des photographes se jettent avec un air inquiet. J'en ai peut-etre même déja des souvenirs, ici.
Hier soir on m'a dit que la jeunesse était l'émanation de ce qui brille au plus profond de nous.
Hier soir je n'etais pas d'accord.
Vieillesse ennemie, comme tu nous auras fait peur.

Et sinon rien à voir mais j'ai un putain de dégout pour les gens qui me disent "j'aime la littérature" au lieu de "j'aime lire".

E

2 commentaires:

  1. A New-York, Paris, Genève ou ailleurs j'ai surtout la molle impression qu'il y a les souvenirs d'avant nos vingt ans et qu'il aura ceux d'après; moins brillants, moins profonds. Vieillesse comme tu ME fait peur.

    F.

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